Une nouvelle famille CASIO
Voici la toute première venue d’une nouvelle famille de calculatrices, les CASIO CW (ClassWiz).
Y a-t-il un intérêt à présenter des calculatrices d’aujourd’hui ? Ne sont-elles pas devenues banales, sans surprises, toutes conçues sur un même modèle ? S’agissant de machines pensées et élaborées par de prestigieux constructeurs historiques, il est toujours intéressant de regarder ceux-ci concevoir, s’adapter à leur public, glisser ici et là des innovations pas forcément bien accueillies par les porte-monnaies. Il est vrai que malgré tout les machines de notre époque ont tendance à se suivre en se ressemblant.
Cette CASIO est pourtant vraiment nouvelle. L’Allemagne semble le premier public visé. La CASIO FX-800DE est conçue exclusivement pour nos amis d’outre Rhin. L’offre fonctionnelle a été calquée au mieux sur le programme et les examens scolaires allemands. Les menus sont donc en allemand, le manuel aussi, et la machine ne propose pas de menu permettant de changer de langue.
Tentons d’explorer ce nouvel objet malgré les difficultés linguistiques prévisibles. Mais où sont les touches de mémoire ? Je ne vois pas STO ou M+ ou MR ni de symboles d’affectation. Tout se passe ici avec la touche « Variables » (le clavier est en anglais). Si la mémorisation et le rappel me semblent plus compliqués qu’avec les touches usuelles, au moins cela allège le clavier.
A ce sujet, on peut remarquer que les touches sont désormais rondes, les légendes plus rares et souvent très visuelles (et dans ce cas combinées avec du texte, comme CATALOG, touche figurée par un livre ouvert). Le pavé directionnel est désormais complété d’un OK bien au centre, plus à sa place que EXE, mais ayant le même rôle. Et une oblongue touche de navigation rapide, du jamais vu et une autre de retour en arrière, gravée d’une flèche qui va et revient, celle bien connue de nos téléphones et déjà vue sur la récente Numworks, qui n’est sans doute pas passée inaperçue aux yeux de Casio.
Notons encore l’apparition à l’écran de boutons d’option. Auparavant on devait taper le chiffre correspondant à l’option choisie. Désormais on navigue dans le menu et l’option choisie est maintenue en surbrillance, ce qui est une bonne chose.
La nouvelle Classwiz est d’une belle finesse et l’écran présente quatre niveaux de gris, pratiques et bien utilisés par le système.
Une originalité de plus : Lors d’une saisie, la FX-800 accepte sans émotion particulière une mantisse suivie d’un exposant de 10 non entier. Pour être exact, contrairement à la plupart des calculatrices scientifiques, la touche d’entrée d’exposant de dix n’affiche pas le traditionnel « E », mais prépare textuellement une multiplication « x 10^ » que l’utilisateur n’a plus qu’à compléter par la valeur de l’exposant de dix. Cette conception n’est pas sans impacter les calculs où les priorités d’opération jouent un grand rôle.
La puce qui anime la nouvelle CW est nouvelle. Elle confère à la FX-800DE une justesse de premier ordre. Le manuel ainsi que l’expérience confirment une précision interne de 23 chiffres. Le nombre PI est juste jusqu’au 23e et dernier chiffre géré. Basculée en mode Bogenmaß (c’est-à-dire Radians), la réponse de Tangente (355/226) donne -7497258,1853255 pour les 14 premiers chiffres, ce qui est remarquablement juste. La 800 ne se voit surclassée, de toutes les machines qui me sont passées entre les mains, que par le SHARP PC-1475, à mode double précision de 20 chiffres + 4 internes. La CASIO FX-991EX, la CANON MARK I PRO, la TI-30X Pro Mathprint sont distancées.
La représentation interne des nombres apparaît de type décimal codé binaire (BCD), soit la représentation classique pour une calculatrice (l’alternative plus rare étant la représentation binaire comme on la trouve dans la CANON F-720i et peut-être dans la CANON X MARK I PRO ce que je n’ai pu établir).
La FX-800 est-elle une machine rapide ? Cela a-t-il un sens s’agissant d’une machine non programmable ? A partir du moment où des fonctions itératives sont proposées (comme la sommation), la célérité est une donnée importante et peut être mesurée. J’ai ainsi chronométré plusieurs calculatrices scientifiques puissantes, sur une sommation de 1 à 10000. Le résultat de ce simple cumul pouvait être trouvé sans passer par toutes ces itérations mais le but est ici d’apprécier une vitesse de calcul. Voici les résultats que j’ai obtenus :
SHARP EL-W516X : 64 secondes
CANON X MARK I PRO : 47 secondes
TI-30X PRO MATHPRINT : 18 secondes
CASIO « CLASSWIZ » FX-991EX : 16 secondes
CASIO FX-800DE CW : 9 secondes
Question matériel, la 800DE se démonte facilement, par dépose de quelques vis au dos. Pas de clips destructeurs, pas de brins de câbles empêchant de séparer les deux moitiés. Je mets l’image de la carte électronique, qui ne révèle hélas rien du processeur.
Sur le plan du design, la CW recèle un paradoxe cocasse. Son allure générale est sobre, la couleur gris foncé mate, l’ambiance plastique assumée, quand les précédentes ClassWiz se voulaient davantage sophistiquées dans leur présentation, avec leurs boutons chromés et les souliers blancs. Pourtant le couvercle nous joue la texture soignée et flatteuse au toucher, avec un surprenant clin d’œil à l’univers du travail des matériaux nobles …
La police de caractères a notablement évolué. Ci-dessous, une représentation des matrices (de tailles identiques pour les deux machines) de la CASIO FX-991EX (à gauche) et de la CASIO FX-800DE CW (à droite – Choix de la police la plus grande parmi les deux proposées pour cette représentation).
Une nouvelle FX-991 CW est désormais sur le marché quelques mois après l’arrivée de la 800. Les pays asiatiques sont les premiers servis. La France ne semble pas bénéficier de cette attention, mais elle aura bientôt un modèle Graph Light qui reprendra une offre fonctionnelle presque identique, à laquelle s’ajoutera un petit module de tracés.
La 991CW a les traits de la 800, notamment l’écran, l’environnement logiciel, la bonne rapidité de calcul, la précision interne de 23 chiffres. En sortie symbolique, la CW ne se laisse plus piéger, à la différence de la EX, par des approximations apparentes de PI. La CW n’attribue le symbole π qu’en échange d’approximations longues de 19 chiffres exacts, ou arrondi pour le dernier (*)
La 991CW présente les mêmes fonctionnalités que la 991EX qu’elle remplace, première Classwiz du nom. La façon d’y accéder est par contre bien différente. Je ne trouve par ailleurs pas trace d’un « deux-points (:) » qui permettait à une 991EX la juxtaposition de plusieurs expressions indépendantes au sein d’une ligne de saisie. Il est dommage ne pas retrouver cette fonctionnalité puissante sur le clavier de la 991CW.
Un petit clin d’œil sur le modèle Classwiz réservé au marché français. Grâce à son module d’algorithmique, j’ai pu tester la précision sur un calcul programmé de cumul des sinus des angles entiers de 1 à 359 degrés. Beaucoup de calculatrices peinent à traduire numériquement la valeur nulle de cette somme. La Classwiz à 23 chiffres (de précision interne) a renvoyé une excellente valeur résiduelle (ci-dessous), comparativement aux autres calculatrices testées.
Le module d’algorithmique existait sur le précédent modèle français mais désormais, il est possible de quitter l’environnement dédié et d’y revenir ensuite sans avoir rien perdu du script. Seule l’extinction de la machine obligerait à tout retaper (dans cet esprit il est possible de paramétrer l’extinction automatique à 60 minutes).
(*) Ci-dessous un tableau illustrant le seuil où la CW assimile une valeur numérique à PI en lui affectant son symbole. Ne disposant ni d’émulateur ni du talent photo adéquat, je reproduis l’écran dans un tableur (où l’on voit des valeurs d’une longueur pas toujours visibles en entier sur l’écran réel, du moins en police standard).