
C’est un fait que dans ce blog, une place importante, quasi obsessionnelle, est accordée à une obscure sous-famille de calculatrices, typiques de la période charnière de la fin des années 70. Au sein de cette famille, un point commun : sous une forme plus ou moins camouflée, il s’agit de répliques techniquement exactes en tous points d’une calculatrice extraordinaire, pour moi en tous cas : ma toute première machine scientifique, une Mondimat de La Redoute, que j’ai si longtemps crue unique.
La Mondimat savait faire deux choses particulièrement inédites : montrer certains nombres à 11 chiffres sous un écran standard à 10 positions, et afficher la factorielle de 73. Pendant des années, aucune des calculatrices passées entre mes mains n’a présenté ce comportement singulier.
Puis j’ai découvert une ADLER LC-1002, et y ai reconnu avec stupéfaction une forme complètement revisitée mais techniquement identique de ma Mondimat. Puis une MBO, puis une NSC, puis une 4e, une 5e …
A ce jour, c’est près de quinze de ces « clones » pittoresques que j’ai réunis, et il en existe encore d’autres. Avec un constat qui va complètement à l’encontre de mon sentiment initial : la plupart des calculatrices scientifiques LCD extra-plates à 10 chiffres qui déferlèrent vers 1978 furent tout bonnement construites autour du même processeur : le Nec D1856G. Rares furent les constructeurs qui s’en passèrent, l’immense majorité des autres, y compris prestigieux, faisant appel à ce cœur électronique commun, décliné de façon immuable sous des dispositions de claviers et habillages les plus divers.
J’ai pu me procurer cette rare et jolie TECXON, qui me vient de Bulgarie. Une marque peu connue, peu étoffée (moins de 5 modèles référencés à ce jour), peu assumée avec son manuel de 6 pages minuscules mentionnant juste Slide Rule en couverture, signe d’une TECXON vraisemblablement bon marché.
Comme la Logitech LC90S, la TECXON s’orne en façade d’une illustration de la célèbre courbe en cloche. Le calcul des probabilités selon la distribution normale était le signe d’une machine puissante, le nec plus ultra des fonctionnalités scientifiques de l’époque.
Je rappelle une fois encore, pour le plaisir, en quoi réside l’identité technique de ces « nec-machines » : une panoplie de fonctions absolument identiques, toujours les mêmes couples de légendes de touches, toujours un interrupteur et un seul, des résultats de calcul rigoureusement identiques, même dans les décimales les plus poussées, des symboles LCD à l’aspect immuable, jamais d’extinction automatique, jamais de mémoire continue, toujours le zéro à gauche, toujours les 4 « shifts » de fonction secondes : le INV, le F, le HYP, le ∑out, le luxe d’un champ de calcul culminant à 9.9999999E106, et quatre décimales décidées à afficher au mieux toutes conversions Degrés-Minutes-Secondes en invoquant s’il le faut … un 11e chiffre !
Mais hormis ces contraintes, une liberté débridée peut s’épanouir et chaque constructeur peut se démarquer, à défaut d’avoir conçu son propre modèle : une grosse carrosserie à piles AA ici, un afficheur gris là, l’interrupteur à droite ou à gauche, une dispersion sans tabou des touches jamais au même endroit d’un clavier à l’autre, parfois un énorme manuel très fourni, d’autres fois trois feuillets indigents. Et ne parlons pas des couleurs …
Le partage d’une électronique commune s’est rencontré à maintes reprises dans l’histoire des calculatrices, mais l’ampleur de celui-ci me parait remarquable, en particulier par le nombre et la notoriété des marques concernées. Si j’ai pu dénombrer 5 ou 6 modèles qu’il me tarde encore de saisir, je pense qu’il est en a existé beaucoup d’autres, sans doute trop peu diffusés à l’époque pour franchir les énormes barrières du temps. Sanyo possède bien sa nec-machine, alors pourquoi pas Toshiba ou Brother ? A vérifier un jour …
Je note que les quatre grands constructeurs toujours actifs à ce jour que sont Casio, Hewlett-Packard, Texas-Instruments et Sharp ont puisé dans leurs propres ressources et sont restés à l’écart de cette aventure.
La TECXON LC-650 répond parfaitement à la définition d’une Nec-machine : Incarnation inédite et pleine de caractère d’une calculatrice toujours unique, ma vieille Mondimat de 1980.
Dernière minute ! : la LS-650 a une sœur jumelle : la LC-670 programmable !
