CASIO GRAPH MATH+
Après la famille novatrice des scientifiques Classwiz de deuxième génération, voici la nouveauté de l’année 2024, une machine graphique dotée d’un aspect qui tranche avec les CASIO de générations antérieures.
L’utilisateur de Classwiz ne sera pas dépaysé, on y retrouve l’esprit et l’agencement des touches, et mieux encore, une toute petite flèche bleue → presque cachée sous la touche bleue SHIFT et qui permet enfin d’affecter une valeur à une variable plus naturellement que dans une Classwiz.
La Math+ est un objet corpulent et lourd, surtout rapporté à ce qu’on aurait pu imaginer quand on tient en main une toute légère Classwiz. L’électronique est héritée de la Graph 90+, la vitesse de calcul aussi et on ne retrouvera pas l’excellente précision de calcul à 23 chiffres des Classwiz.
On le sait, la Math+ a été diffusée incomplète. Des applications seront ajoutées plus tard. Le module de programmation en Casio-Basic en fera-t-il partie ? Car la Math+ en est bel et bien dépourvue. Pour la première fois depuis des décennies, le seul moyen de la programmer est de passer par l’application de programmation en langage python, implémentation au demeurant plaisante.
Certes un programme en python pourra se montrer plus ambitieux qu’un simple et intemporel Casio-Basic, au prix d’un protocole plus compliqué qui en découragera peut-être plus d’un.
Il y a un autre prix à payer. La programmation en python est ici prisonnière de son application. Les résultats de calculs programmés déversés dans des variables ne seront pas accessibles une fois revenu au mode de calcul standard. Les variables n’y sont pas manipulables ni même visibles. L’outil calculatrice et l’outil programme ne se connaissent plus, ils sont strictement cloisonnés, même si leur clavier est commun. Pour mémoire, la petite scientifique FX-92 CW conserve le contenu des variables alimentées par le module de création de scripts.
A partir du moment où une calculatrice ne récupère pas le contenu d’un travail programmé, peut-on considérer que la Math+ est encore une calculatrice programmable ? Pour les distraits ou nostalgiques qui n’avaient pas encore bien compris, Casio assume ici au grand jour la destination qu’il donne à ses productions, elles sont exclusivement des outils pédagogiques pour apprendre la programmation python et les mathématiques, et non plus des outils de calcul. Même si la frappe d’un calcul compliqué reste bien entendu possible, la philosophie est ailleurs, la machine est un assistant scolaire et rien d’autre, une calculatrice-école, l’utilisateur demandeur de calcul programmé est oublié, renvoyé à ses souvenirs et émotions surannés, c’est brutal mais clair.
Depuis le temps que les prospectus de simples calculatrices promettent de transformer les écoliers en cracks des maths, on s’étonnerait presque d’en être toujours là, sous la forme ici la plus pénétrante d’une stratégie d’entreprise fondée sur un inusable slogan, « les maths ce sera très dur pour les autres, mais pas pour les malins qui ont choisi le bon outil magique ».
Ainsi il y a peu de raison de penser qu’un module Casio-Basic d’origine ou rénové – voire une évolution du module de scripts de la FX92 – soit ajouté dans une version plus complète à venir, ce serait un non-sens. Ainsi va la vie. Attendons-nous plutôt, à moyen terme, à une logique disparition de la partie calcul de cette machine schizophrène au profit d’un toujours onéreux accessoire scolaire parlant et ne pensant que maths et python. Fiction ? Ce sera sans moi en tous cas.
Une publicité de 1987 parmi d’autres qui promettait déjà de faire passer la pilule des maths à tous.
Image tirée du site Les Pas Perdus http://www.emmella.fr/page9135-4178-5500-7342-6040__3067-7453-4271-5546-6736.html