T18 – Mars : L’aura-t-on et veut-on l’avoir ?
[29/09/2024]
ALLER SUR MARS, UNE AVENTURE EXTRAORDINAIRE ?
Il semble que certains décideurs de premier plan, parfois fortunés, travaillent à la préparation de missions vers la planète rouge. C’est curieux mais cette idée me procure peu d’enthousiasme.
Il est loin ce temps où j’observais assidument le ciel, ses planètes et ses étoiles, longtemps à l’œil nu. Au bout de quelques mois, mes parents avaient décidé de me payer une petite lunette astronomique d’initiation qui grossissait 100 fois.
Le ciel vu au travers d’une lunette était tout autre, enfin je voyais de pâles nébuleuses, des amas d’étoiles, la Voie Lactée et ses millions de points minuscules, je voyais les énormes cratères de la lune, l’anneau de Saturne … La passion était décuplée. J’achetais maintenant des magazines périodiques où j’apprenais plein de choses. La passion avait pris une autre dimension.
Au point que l’achat d’un matériel plus sérieux fut envisagé. Dix-huit mois plus tard, je me rendais dans la boutique de l’opticien pour emporter l’instrument qui venait d’y être livré. La boîte était énorme et lourde. Il s’agissait cette fois d’un télescope, un modèle répandu dans les clubs d’astronomie, il grossissait 200 fois.
L’utilisation s’avéra une relative déception. Je voyais certes les choses plus proches encore qu’avec ma petite lunette mais je ne découvrais rien de nouveau. Il n’y avait pas la surprise du ciel profond procurée par la lunette quelques mois auparavant.
Et pour cause, avec son grossissement de 100 fois ma petite lunette avait constitué un progrès de facteur 100 par rapport à l’observation à l’œil nu. Tandis que le nouveau télescope ne m’apportait finalement qu’un progrès de facteur 2.
Je peux comparer ce ressenti avec la conquête martienne. Pour reprendre l’illustration ci-dessus, si celle de la Lune, événement sans précédent, avait permis un progrès de 100 aux yeux du monde, celle de Mars ne sera que d’un facteur 2. Du déjà-vu. On pourrait parier que le monde ne s’y intéressera guère. Bien sûr on regardera le décollage de la fusée, on tremblera pour les occupants quand ils atterriront mais on regardera ailleurs pendant le long voyage et quand la vie martienne se déroulera au quotidien. Les nouvelles seront d’ailleurs sans doute peu variées et ennuyeuses.
Peut-être des responsables de médias guetteront-ils les idylles et les disputes en en feront des épisodes prisés du grand public, mais toute cette aventure martienne risque d’être sans grand relief.
Parfois on nous présente ces préparatifs comme l’aube d’une aventure passionnante, un saut dans l’inconnu où le spectateur pourra ouvrir tout grands ses yeux. C’est oublier l’énorme corpus de photographies que les différentes missions robotisées martiennes ont produites au cours des cinquante dernières années. Des robots circulent d’ailleurs en ce moment même sur Mars. Qui s’en passionne au quotidien, qui regarde ces époustouflantes images accessibles pourtant en un clic ? Mars ennuie Madame et Monsieur tout-le-monde, j’en ai peur, je peux en tous cas en témoigner en ce qui me concerne, tout semble déjà dévoilé, et désormais affaire de spécialistes pointus.
Pour un nouveau progrès de facteur 100, ce n’est pas Mars mais plutôt une étoile proche qu’il faudrait viser, sortir du système solaire en le traversant, l’étudiant au passage, révélant des mystères ténébreux et inaccessibles à nos yeux terrestres comme le nuage d’Oort.
J’avais vu un tel projet, celui d’approcher l’étoile Proxima du Centaure voilà quelques courtes années, mais je n’en entends plus parler. Un projet où les passagers humains étaient exclus, les véhicules minuscules et nombreux, lancés par bouquets, accélérés continûment, un temps de voyage avoisinant les trente ans …
La Lune était un rêve qui fut réalisé, Mars n’en a jamais été un pour le grand public. Aller vers une étoile, vers l’inconnu, pourrait bien en être un nouveau, et de première grandeur.