CASIO FX-800DE CW

Voici une nouvelle CASIO.

Existe-t-il un intérêt à présenter une calculatrice d’aujourd’hui ? Ne sont-elles pas devenues banales, sans surprises, toutes conçues sur le même modèle ?

S’agissant de machines pensées et élaborées par de prestigieux constructeurs historiques, Il est toujours intéressant de regarder ceux-ci concevoir, s’adapter à leur public, tenter ici et là des innovations pas toujours bien accueillies par les porte-monnaies. Mais bon, il n’est pas faux que les machines de notre époque ont tendance à se suivre en se ressemblant. Voilà pourtant une CASIO vraiment nouvelle.

La CASIO FX-800DE a été conçue exclusivement pour nos amis d’outre Rhin. Son offre fonctionnelle colle au plus près aux programmes et examens scolaires allemands. Les menus sont en allemand, le manuel aussi et la machine ne propose pas de menu permettant de changer de langue. C’est dommage car on a beau être habitué au maniement de ces machines, certaines fonctions appellent parfois des explications, surtout quand la machine n’est pas tout-à-fait comme les autres.

Par exemple, où sont les touches de mémoire ? Je ne vois pas STO ou M+ ou MR ni de symboles d’affectation. Tout se passe ici avec la touche « Variables« . Si la mémorisation et le rappel me semblent plus compliqués qu’avec les touches usuelles, au moins cela allège le clavier.

A ce sujet, on peut remarquer que les touches sont désormais rondes, les légendes plus rares et souvent visuelles et dans ce cas combinées avec du texte, comme CATALOG, touche figurée par un livre ouvert). Le pavé directionnel est complété d’un OK bien au centre, plus à sa place que EXE, mais ayant visiblement le même rôle. Et une oblongue touche de navigation rapide, du jamais vu et une autre de retour en arrière, gravée d’une flèche qui va et revient, celle bien connue de nos téléphones et déjà vue sur la récente Numworks, qui n’est sans doute pas passée inaperçue aux yeux de Casio.

Notons encore les boutons d’option qui peuplent dorénavant les menus de paramétrage (touche Setting), montrant toujours le choix en cours.

La FX-800 est une machine légère et fine. Son positionnement en termes de fonctionnalités est en dessous de la ClassWiz FX-991EX actuelle. Il lui manque notamment le moteur de calcul intégral et pas mal d’autres choses, et elle n’a que 4 icônes de menus qui se sentent un peu seuls pour partager tout l’écran. Celui-ci est d’une belle finesse et présente quatre niveaux de gris, pratiques et bien utilisés par le système.

La puce qui l’anime est de toute évidence nouvelle. Elle confère à la FX-800DE une justesse redoutable. Le manuel ainsi que l’expérience confirment une précision interne de 23 chiffres. Le nombre PI est juste jusqu’au 23e et dernier chiffre géré. Basculée en mode Bogenmaß (c’est-à-dire Radians), la réponse de Tangente (355/226) donne -7497258,1853255, pour les 14 premiers chiffres, remarquablement justes. La 800 ne se voit surclassée, de toutes les machines qui me sont passées entre les mains, que par le SHARP PC-1475, à mode double précision de 20 chiffres + 4 internes. L’ancienne CASIO FX-991EX, la CANON MARK I PRO, la TI-30X Pro Mathprint sont distancées sur ce point.

La FX-800 est-elle une machine rapide ? Cela a-t-il un sens s’agissant d’une machine non programmable ? A partir du moment où des fonctions « itératives » sont proposées (comme la sommation), la célérité est une donnée importante et peut être mesurée.

J’ai ainsi chronométré plusieurs calculatrices scientifiques puissantes, sur une sommation de 1 à 10000. Le résultat de ce simple cumul pouvait être trouvé sans passer par toutes ces itérations mais le but est ici d’apprécier une vitesse de calcul. Voici mes résultats :

SHARP EL-W516X : ≅64 secondes
CANON X MARK I PRO : ≅47 secondes
TI-30X PRO MATHPRINT : ≅18 secondes
CASIO « CLASSWIZ » FX-991EX : ≅16 secondes
CASIO FX-800DE CW : ≅9 secondes

La police de caractères a notablement évolué avec la nouvelle 800DE. Ci-dessous, une représentation des matrices de la CASIO FX-991EX (à gauche) et de la CASIO FX-800DE CW (à droite).

En conclusion l’allemande CASIO FX-800 est la première venue d’une nouvelle génération de calculatrices scientifiques CASIO s’adressant à l’ensemble du monde et plus seulement à l’Allemagne.


En marge de cette présentation, quel bilan pour les écrans couleur actuels ?

Lorsque je mets d’un côté une CASIO ClassWiz (ou une TI MathPrint Pro), simples scientifiques récentes et de l’autre côté une CASIO Prizm (ou TI n’Spire CX ou HP Prime), calculatrices graphiques d’aujourd’hui – un peu moins récentes -, je suis pris d’un doute : l’avenir, y compris graphique, n’est-il pas dans le principe d’affichage des premières, soit un écran sans couleurs ?

Qu’ont apporté finalement les afficheurs modernes des machines graphiques des années 2010 ?

Avec eux le progrès fut spectaculaire. On est passé des pixels noirs de taille grossière à des écrans bien plus définis, en couleur, éclairés, parfois tactiles, mais aussi dévoreurs d’énergie. Cette offre est-elle désormais incontournable ?

Je ne conteste pas l’apport d’écrans bien définis. En revanche, la couleur fait débat depuis longtemps. Même si personnellement je pense que la vie prend tout son sens en couleur, d’aucuns nient ce besoin s’agissant des mathématiques. Il est vrai que la couleur est finalement peu utilisée dans ces machines.

La pédagogie était l’argument commercial initial : la possibilité d’héberger des images de qualité photographique pour leur y détecter ou appliquer des principes géométriques. Aujourd’hui je vois dans les seules applications Python embarquées une utilisation manifeste de la couleur.

Le rétroéclairage est-il à son tour utile ? A quoi bon avoir un écran lumineux si les touches et légendes du clavier restent invisibles sitôt le soleil couché. Quant à  la fonction tactile, c’est un plus mais cela change-t-il la vie des utilisateurs ? Le demandent-ils ? En redemandent-ils ?

Si je tente d’imaginer l’avenir je verrais bien une nouvelle calculatrice graphique légère,  dotée d’une technologie d’affichage similaire à celle d’une 800DE. Le grand écran très défini se présenterait en quelques niveaux de gris, sans rétro éclairage (ou bien à la demande – voir la CASIO GRAPH 95) – ni dispositif tactile.

Le gain d’un tel écran graphique serait une consommation et des dimensions (épaisseur, poids) plus mesurées ainsi qu’une autonomie retrouvée. Est-ce l’avenir ?

A bien regarder, de telles calculatrices ont existé : Les HP-39GII et TI-n’SPIRE de première génération étaient conçues ainsi. Et leur affichage était somptueux. Les suivantes ont introduit le concept HD couleur rétroéclairé. Cette conquête est-elle définitive ? On peut en douter si on en juge par l’ultime étape tactile qui, hors HP Prime et CP400 resterait encore à implémenter pour d’autres, à moins que cette étape ne soit tout simplement plus envisagée. La porte de l’évolution reste ouverte. Alors pourquoi pas ? Fin de cette réflexion toute personnelle.


[Ajout du 25 mars 2023 sur la nouvelle Casio Fx-991CW]

Quelques mois se sont écoulés depuis l’arrivée de la 800, première née de la famille Classwiz de 2e génération. La 991CW est désormais commercialisée.

Prendre en main une Casio fx-991CW en ce printemps 2023 n’est pas chose commode pour qui est résident Français. Casio dirige en effet ses premiers efforts vers les marchés asiatiques, comme les Philippines, l’Inde, le Viet-nam… Outre les langues, alphabets et monnaies exotiques pratiqués par les sites de vente locaux, il reste le pari d’une expédition vers la France, pas simple à remporter.

La 991CW a les traits de la 800, notamment l’écran, l’environnement logiciel, la bonne rapidité de calcul, la précision interne de 23 chiffres. En sortie symbolique, la CW ne se laisse plus piéger, à la différence de la EX, par des approximations apparentes de PI, comme des internautes facétieux s’étaient amusés à le montrer. La CW n’attribue le symbole π qu’en échange d’approximations longues de 19 chiffres exacts (ou arrondi pour le dernier).

Comparée à la première Classwiz 991EX, les fonctionnalités de la CW sont accédées de façon nouvelle, ce sont cependant les mêmes ou quasiment. Je n’ai pas décelé de grandes surprises. Un exemple : tout comme la 991EX, la CW sait décomposer en produits de facteurs premiers. Dans la première on agit sur la légende dédiée FACT. Dans la seconde, c’est la touche FORMAT qui appelle un menu contenant le choix de la décomposition.

Je ne trouve plus trace d’un « deux-points (:) » qui permettait dans une 991EX la juxtaposition de plusieurs propositions liées au sein d’une même ligne de saisie. Cette fonctionnalité est puissante, c’est dommage ne pas la retrouver sur le clavier de la 991CW.

L’environnement logiciel de la CW emploie beaucoup de menus et de boutons d’options. C’est moderne et conversationnel. Pourtant, à l’utilisation, il peut sembler moins pratique de naviguer dans ces menus que de taper le chiffre de la ligne voulue comme la EX le permettait.

En une seule phrase : par rapport à la précédente 991EX, la nouvelle 991CW est un objet différent, léger, qui fait finalement la même chose, autrement, plus vite, de façon ultra précise, en affichant sur 4 niveaux de gris.

Il reste à espérer que Casio tourne de nouveau ses yeux vers les contrées européennes. C’est déjà le cas pour l’Allemagne décidément, qui a depuis peu sa propre 991DE CW.


[Ajout du 3 janvier 2024] Un petit clin d’œil sur le modèle Classwiz réservé au marché français. Grâce à son module d’algorithmique, j’ai pu tester la précision sur un calcul programmé de cumul des sinus des angles entiers de 1 à 359 degrés. Beaucoup de calculatrices peinent à traduire numériquement la valeur nulle de cette somme. La Classwiz à 23 chiffres (de précision interne) a renvoyé une excellente valeur résiduelle (ci-dessous), comparativement aux autres calculatrices testées.

Le module d’algorithmique existait sur le précédent modèle français mais désormais, il est possible de quitter l’environnement dédié et d’y revenir ensuite sans avoir rien perdu du script. Seule l’extinction de la machine obligerait à tout retaper (dans cet esprit il est possible de paramétrer l’extinction automatique à 60 minutes).